En course auto, les spectateurs sont sympas. Ancien pilote amateur et moi-même spectateur assidu, je l’ai constaté à de nombreuses reprises. Beaucoup de gens sont franchement très gentils, et pas seulement avec les grands pilotes que tout le monde connaît.
Quelques exemples pour illustrer cette affirmation qui ne relève ni des effets d’un produit euphorisant, ni d’une naïveté soudaine. Je vous assure que je sais pousser des coups de gueule quand quelque chose ou quelqu’un me révolte dans le monde du sport auto ou ailleurs.
Le premier souvenir de gentillesse dans le sport auto que je citerai remonte à 1976, le jour de la Course de côte des M d’Avranches. J’ai 21 ans, je suis encore étudiant, et je suis engagé à ma troisième course. Les deux premières ont été le slalom d’Avranches et la Course de côte de Saint-Germain sur Ille auprès de Rennes. Je cours avec une Opel Ascona 19 SR groupe 1 avec laquelle je roule au quotidien. Une vraie voiture de série. Le moteur développe 90 cv. La préparation se limite à4 amortisseurs de Carbon pistes et aux accessoires de sécurité : l’arceau, les harnais, le coupe-circuit, l’extincteur, les attache-capots. Je dispose tout de même de 4 slicks que j’amène dans le coffre les week-ends de course. Une fois arrivé, je monte moi-même les jantes équipées de slicks à la place de celles chaussées de pneus de tourisme. Je n’ai pas de plateau (de toute façon, je roule et je cours avec la même voiture) et je ne me suis pas encore organisé avec les copains qui mettront en place une superbe assistance avec des moyens plus que raisonnables les saisons suivantes.
J’arrive à Avranches le dimanche matin. Je n’ai pas pu venir le samedi ; je passais un écrit de droit civil qui comptait pour les examens de licence. Je gare l’auto sur un parking et je commence à changer mes roues. Un gars un peu plus jeune, 18-19 ans, engage la conversation. Personne ne me connaît. Échappement et Ouest-France n’ont encore jamais parlé de moi. Avec mon Ascona, je ne risque pas d’aller chercher les Christian Galopin, Christian Rio (Alfa 2000 GTV), Fabrice Malherbe, Didier Calmels (Triumph Dolomite), qui se battront pour la victoire de groupe avec quelques autres pilotes aguerris et bien équipés. Mon interlocuteur propose spontanément de m’aider à monter mes jantes équipées de slicks. J’accepte bien sûr. Je pars aux vérifs, puis je me présente sur la ligne de départ pour effectuer mes montées d’essais. Mon interlocuteur va se placer au haut du tracé, dans les fameux M qui font le charme du tracé, un enchaînement où les pilotes prennent de gros appuis.
Nous nous reverrons à midi, puis après les montées de course, car mon nouveau copain viendra me rejoindre au terme de la course pour m’aider à remonter mes pneus de route ! Je lui offrirai un pot avant de partir, mais il tiendra à remettre sa tournée. Un gars vraiment sympa dont la gentillesse totalement désintéressée m’a fait plaisir ce jour-là.
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Un autre souvenir un brin humoristique. Trois ans plus tard, je prends le départ du rallye de Touraine. Je cours en Golf GTI depuis 1977. J’ai remporté des victoires de classe en course de côte, la voiture est bien préparée, je la tracte sur un plateau, et des copains me font l’assistance. Je pense avoir bien reconnu. Seul souci, le dimanche matin, il tombe des cordes. Mon navigateur et moi sommes un peu inquiets de ce qui nous attend. Au départ de la première spéciale, j’essaie de conduire propre. Nous voyons quelques autos dans les talus et les champs, ce qui n’incite pas aux folies. Pourtant, nous revenons sur la Kadett GTE qui est partie devant nous. Je l’ai en visuel, je suis à 100 mètres, 50 mètres… Le gars prend plus de risques. Moi aussi. Si je reviens comme ça, c’est bon signe, je vais être bien au groupe, même si je ne rêve pas de taper Clarr qui va dominer les débats. Bernard, un copain mordu de sports mécaniques que j’ai connu au service militaire l’année précédente et qui monte pour la première fois dans le baquet de droite m’annonce un 90 gauche et répète l’annonce, histoire de me rappeler qu’il est temps de freiner. C’est déjà et ça restera son truc à Bernard quand il pense qu’il faut calmer le jeu. Il répète les notes. Par exemple, « droite moyen se referme, se referme beaucoup, se referme beaucoup, beaucoup … » Mais l’excitation du pare-choc arrière de la Kadett GTE et la perspective de lui faire signe d’ici un deux virages par un appel de phares bien senti que je veux passer l’emporte sur la sagesse de mon pote dans le baquet de droite.
Lorsque nous repasserons à ce virage de la spéciale, nous verrons que leurs cirés sont couverts de boue, mais ils nous applaudiront et nous adresseront des signes d’encouragement. Encore des gars super-sympas !
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Dernier exemple pour aujourd’hui, la Course de côte de Saint-Germain sur Ille 1980. A cette époque, il existait une tradition avant cette épreuve. De nombreux pilotes, dont moi, venaient rouler sur le tracé avec les voitures de course un soir de la semaine précédant la course. La coutume enchantait certains riverains car elle générait une belle animation. Elle excédait quelques grincheux obnubilés par le bruit et la sécurité routière. Tout se déroulait pourtant dans le souci de la sécurité optimale car les riverains du circuit faisaient la circulation, indiquant à l’entrée des virages si nous pouvions passer à l’attaque et en trajectoire ou s’il fallait ralentir à cause de voitures de tourisme arrivant en sens inverse.
Vous pouvez également me retrouver sur http://circuitmortel.com , https://gotmdm.com/driver/ et http://polarssportsetlegendes.over-blog.com/
Thierry Le Bras